Analyse


Eradication de l’Helicobacter pylori : la fin de la trithérapie standard ?


15 03 2016

Professions de santé

Analyse de
Li BZ, Threapleton DE, Wang JY, et al. Comparative effectiveness and tolerance of treatments for Helicobacter pylori: systematic review and network meta-analysis. BMJ 2015;351:h4052.


Conclusion
Cette synthèse méthodique avec méta-analyse en réseau correctement conduite remet en question l’utilité de la trithérapie standard. En attendant que des études soient menées à un niveau plus régional et tiennent compte des résistances locales, une bonne alternative à la trithérapie classique consiste à prescrire une quadrithérapie de brève durée.


 

Nous avons commenté dans Minerva (1) une synthèse méthodique publiée en 2009 (2) et nous avions conclu que, pour l’éradication de l’Helicobacter pylori, on manquait d’arguments permettant de préférer systématiquement un traitement séquentiel (consistant à administrer un inhibiteur de la pompe à protons (IPP) deux fois par jour pendant 10 jours, les 5 premiers jours avec amoxicilline 1g 2x/j et les 5 jours suivants avec clarithromycine 500 mg 2x/j + tinidazol 500 mg 2x/j) versus traitement standard (associant un IPP 2x/j pendant 7 ou 10 jours et amoxicilline 1g 2x/j + clarithromycine 500 mg 2x/j). En 2013, une méta-analyse publiée dans le BMJ (3) avait montré qu’un traitement séquentiel était plus efficace qu’une trithérapie de 7 jours et aussi efficace que les thérapies plus longues ou comportant plus de deux antibiotiques. Les auteurs avaient conclu que, dans l’attente d’un nouvel antibiotique contre H. pylori, il convenait de continuer à utiliser les associations de médicaments les plus efficaces et ayant le moins d’effets indésirables.

 

En 2015, une nouvelle synthèse méthodique avec méta-analyse en réseau a été réalisée regroupant 143 essais randomisés chez 32056 patients âgés de plus de 18 ans présentant une infection à Helicobacter pylori prouvée, avec ou sans ulcère gastrique ou duodénal et non encore traités (4). Les résultats sont rapportés en intention de traiter pour 14 schémas thérapeutiques différents (!) pour l’éradication de l’H. pylori. Toutes les stratégies sauf deux étaient plus efficaces que la trithérapie standard de 7 jours. Les thérapies d’une durée de 10 ou 14 jours ont donné de meilleurs pourcentages d’éradication que les thérapies d’une durée de 7 jours et les auteurs ont constaté que plus le schéma était court, moins il y avait d’effets indésirables.

Les thérapies les mieux tolérées étaient les trithérapies d’une durée de 7 jours auxquelles étaient ajoutés des probiotiques, et les trithérapies d’une durée de 7 jours comportant de la lévofloxacine. Lorsque l’efficacité et la tolérance du traitement étaient simultanément prises en compte, il apparaissait que le score le moins favorable était lié à la trithérapie standard. Les traitements les plus efficaces étaient, dans l’ordre : 7 ou 10 à 14 jours d’une association d’IPP + 3 antibiotiques (amoxicilline + clarithromycine + nitro-imidazolé), 10 à 14 jours de trithérapie à laquelle était ajouté un probiotique, 10 à 14 jours de trithérapie comportant de la lévofloxacine (+ IPP + amoxicilline ou clarithromycine), 14 jours de thérapie hybride (7 jours IPP + amoxicilline suivis de 7 jours IPP, amoxicilline, clarithromycine + métronidazole) et 10 à 14 jours de thérapie séquentielle (5 jours IPP + amoxicilline, suivis de 5 jours IPP + clarithromycine + métronidazole). Le taux d’éradication était plus élevé si le traitement était prolongé au-delà de 7 jours, mais le risque de développer des effets indésirables était alors accru.

 

Les résultats de cette méta-analyse en réseau ne tiennent cependant pas compte des statistiques régionales concernant la résistance de l’Helicobacter pylori. La revue Prescrire a publié en 2015 (5) une synthèse sur la prise en charge de l’Helicobacter pylori, en tenant compte dans la mesure du possible de la résistance locale en Belgique et en France. Les critères de jugement étaient le taux d’éradication de l’Helicobacter pylori mais aussi la prévention des récidives des ulcères gastriques et duodénaux (tout en reconnaissant qu’ils étaient rarement étudiés) et les résultats étaient présentés si possible en intention de traiter. Les conclusions étaient que l’association d’un IPP (20 mg 2x/j) et d’amoxicilline (1 gr 2x/j) + clarithromycine (500 mg 2x/j) + métronidazole (500 mg 2x/j) pendant 5 jours, soit ensemble soit de manière séquentielle, versus trithérapie standard, porte le taux d’éradication à 90% sans augmentation des effets indésirables. La thérapie séquentielle n’a pas montré de différence quant à l’efficacité et quant à la prévention des effets indésirables. En cas d’allergie aux bêta-lactames, l’amoxicilline peut être remplacée par une quinolone (avec une plus grande probabilité de résistance) ou par la tétracycline ou la doxycycline (avec peu de résistance).

 

Conclusion 

Cette synthèse méthodique avec méta-analyse en réseau correctement conduite remet en question l’utilité de la trithérapie standard. En attendant que des études soient menées à un niveau plus régional et tiennent compte des résistances locales, une bonne alternative à la trithérapie classique consiste à prescrire une quadrithérapie de brève durée.

 

 

Références

  1. Ferrrant L. Eradiquer l’HP : traitement séquentiel ou de référence actuel ? MinervaF 2009;8(5):54-5.
  2. Jafri NS, Hornung CA, Howden CW. Meta-analysis: sequential therapy appears superior to standard therapy for Helicobacter pylori infection in patients naive to treatment. Ann Intern Med 2008;148:923-31.
  3. Gatta L, Vakil N, Vaira D, Scarpignato C. Global eradication rates for Helicobacter pylori infection: systematic review and meta-analysis of sequential therapy. BMJ 2013;347:f4587.
  4. Li BZ, Threapleton DE, Wang JY, et al. Comparative effectiveness and tolerance of treatments for Helicobacter pylori: systematic review and network meta-analysis. BMJ 2015;351:h4052.
  5. Prescrire Rédaction. Infection par Helicobacter pylori et ulcère gastrique ou duodénal. Rev Prescrire 2015;35:756-62.

Auteurs

Ferrant L.
Vakgroep eerstelijns- en interdisciplinaire zorg, Centrum voor Huisartsgeneeskunde, Universiteit Antwerpen
COI :

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