Analyse


Contraception réversible de longue durée = méthode de choix ?


07 04 2016

Professions de santé

Analyse de
O’Neil-Callahan M, Peipert JF, Zhao Q, et al. Twenty-four-month continuation of reversible contraception. Obstet Gynecol 2013;122:1083-91.


Conclusion
Cette étude de bonne qualité méthodologique montre que les contraceptifs réversibles de longue durée d’action (LARC) – offerts - permettent d’assurer une meilleure continuité de la contraception que les autres contraceptifs (non-LARC) chez des femmes correctement informées. Malgré leur coût initial élevé, les moyens de contraception de longue durée (DIU et implants) sont financièrement rentables de par leur efficacité et leur continuité élevée chez les adolescentes comme chez les femmes adultes.


 

Selon le Rapport de la Commission nationale d'évaluation de la loi du 3 avril 1990 relative à l'interruption de grossesse (1), entre 1993 et 2011 le nombre d'interruptions volontaires de grossesses pratiquées légalement en Belgique est passé de 10 217 à 19 455. Les taux d'avortements ont augmenté principalement entre 1993 et 2000, à tous les âges. Cette augmentation a été surtout marquée chez les femmes de 20 à 34 ans depuis 2005. La proportion de grossesses se terminant par un avortement est passée de 6,5% en 1993 à 11,1% en 2011. Le profil des femmes qui recourent à l’IVG en Belgique n’a cependant pas beaucoup changé depuis 1993 et la répartition par âge des femmes qui ont eu recours à une IVG est stable. 57% des femmes déclaraient avoir utilisé une méthode contraceptive au cours du cycle précédant l'intervention. Les grossesses non désirées restent donc un problème de santé publique. Pouvoir accompagner au mieux ces femmes et éviter une nouvelle grossesse non désirée est dès lors un enjeu important pour les cliniciens. Minerva n’a pas encore abordé le sujet de la contraception réversible de longue durée (DIU, implant et injection), alors qu’ils peuvent contribuer à diminuer le nombre de grossesses non désirées (2).

 

L’étude de O’Neil-Callahan et al. (3) a pour but d’évaluer la continuité à 24 mois de toutes les méthodes de contraception réversibles utilisées par 6153 femmes (âge moyen de 25 ans) participant au Contraceptive CHOICE Project (de 2007 à 2011). C’est une étude de cohorte prospective d’observation aux USA qui fait l’hypothèse que les méthodes contraceptives de longue durée (LARC - long acting reversible contraception, comprenant les DIU et les implants) sont plus efficaces que les méthodes contraceptives plus conventionnelles (CO, anneau vaginal, patch) dans le but de diminuer les grossesses non désirées. Les femmes incluses devaient avoir entre 14 et 45 ans, ne pas utiliser régulièrement de contraception ou avoir envie de changer de méthode contraceptive, sans désir de conception dans les 12 mois, avoir une activité sexuelle avec un partenaire mâle, et accepter d’être suivies par le centre de santé les prenant en charge dans le cadre de l’étude. Après une information standardisée sur les contraceptions réversibles de longue durée et une information à propos des autres contraceptifs disponibles (en les mentionnant dans l’ordre de leur efficacité respective), les femmes ont choisi une méthode de contraception - qui leur était offerte - pour les 2 à 3 ans à venir. Le suivi s’est fait par interviews téléphoniques structurés à 3 et 6 mois puis tous les 6 mois.

 

Les résultats montrent qu’après 24 mois, la continuité pour les DIU et les implants était bien plus grande (77%) que pour les autres moyens de contraception (41%). Autrement présentés, les résultats montrent que les LARC présentent significativement moins de discontinuité contraceptive que les non-LARC (HR ajusté de 0,29 avec IC à 95% de 0,26 à 0,32). La continuité était similaire pour le DIU au lévonorgestrel (79%) et pour le DIU au cuivre (77%). Pour l’implant, la continuité était statistiquement plus faible (69%, p<0,001) que pour les DIU. Il n’y avait pas de différence statistiquement significative dans la continuité à 24 mois entre les autres contraceptifs non-LARC (pilule 43%, patch 40%, anneau vaginal 41%, dépôt medroxyprogesterone acétate 38%). Même si la continuité était moins bonne pour les adolescentes que pour les femmes adultes, 2/3 des adolescentes (14-19 ans) utilisaient toujours leur contraception longue durée après 2 ans, versus 1/3 pour les autres moyens contraceptifs. Chez les femmes adultes, 78% utilisaient toujours leur contraception longue durée après 2 ans versus 42% pour les autres contraceptifs.

Les femmes ayant un antécédent de grossesse, de grossesse non-planifiée ou d’IVG avaient une continuité supérieure aux autres participantes. Par contre, les femmes ayant un antécédent d’infection sexuellement transmissible étaient plus à risque d’arrêter leur contraception. Nous savons par ailleurs que les femmes ayant eu une IVG sont plus à risque d’avoir d’autres grossesses non désirées (4,5), et que les adolescentes qui donnent naissance à un enfant sont également à risque d’avoir d’autres grossesses non désirées ainsi que d’autres IVG (6).

 

Malgré leur coût initial élevé, les moyens de contraception de longue durée (DIU et implants) sont financièrement rentables (7) vu leur excellente efficacité et leur continuité élevée chez les adolescentes comme chez les femmes adultes.

Une étude longitudinale suédoise publiée en 2010 (8) avait suivi un groupe de femmes (âge de 19 à 44 ans) afin de répertorier les grossesses et les moyens de contraception utilisés pendant 25 ans. Le choix d’un moyen contraceptif était fortement lié à l’âge. Jusqu’à l’âge de 29 ans, la contraception orale était la plus utilisée, alors que le DIU était ensuite la méthode de choix.

 

Plusieurs études ont également démontré l’efficacité des contraceptions de longue durée proposés lors des IVG afin d’éviter de nouvelles grossesses non désirées (9-11). En pratique, malheureusement, en Belgique, les femmes ayant des problèmes financiers ne peuvent souvent pas acheter un DIU au lévonorgestrel ou un implant à mettre lors d’une IVG. Même si certaines mutuelles remboursent ultérieurement ces contraceptions, ces femmes ont souvent des difficultés à avancer l’argent. Il en résulte que les femmes les plus vulnérables n’ont souvent pas accès aux méthodes les plus efficaces (1).

 Il pourrait donc être judicieux que les contraceptifs réversibles de longue durée (LARC) pour tous les âges soient mieux remboursés, et que le corps médical adopte la position de promouvoir les contraceptions réversibles de longue durée. Il est également important de donner les informations sur les contraceptifs en les mentionnant dans l’ordre de leur efficacité respective. Ceci afin que les femmes puissent choisir leur contraception en connaissance de cause. Enfin, comme le soulignait déjà le rapport de la Commission nationale susmentionné (1), assurer la gratuité des contraceptifs (pour rappel dans l’étude analysée ici les contraceptifs étaient offerts), quel que soit l'âge de la femme ou, au moins, mettre en place une réelle cohérence entre les prix actuels, devrait être une priorité.

 

Conclusion

Cette étude de bonne qualité méthodologique montre que les contraceptifs réversibles de longue durée d’action (LARC) – offerts - permettent d’assurer une meilleure continuité de la contraception que les autres contraceptifs (non-LARC) chez des femmes correctement informées. Malgré leur coût initial élevé, les moyens de contraception de longue durée (DIU et implants) sont financièrement rentables de par leur efficacité et leur continuité élevée chez les adolescentes comme chez les femmes adultes.

 

 

Références

  1. Rapport de la Commission nationale d'évaluation de la loi du 3 avril 1990 relative à l'interruption de grossesse. Rapport à l'attention du Parlement: 1er janvier 2010 - 31 décembre 2011.
  2. Winner B, Peipert JF, Zhao Q, et al. Effectiveness of long-acting reversible contraception. N Engl J Med 2012;366:1998-2007.
  3. O’Neil-Callahan M, Peipert JF, Zhao Q, et al. Twenty-four-month continuation of reversible contraception. Obstet Gynecol 2013;122:1083-91.
  4. Heikinheimo O, Gissler M, Suhonen S. Age, parity, history of abortion and contraceptive choices affect the risk of repeat abortion. Contraception 2008;78:149-54.
  5. Lindh I, Blohm F, Andersson-Ellström A, Milsom I. Contraceptive use and pregnancy outcome in three generations of Swedish female teenagers from the same urban population. Contraception 2009;80:163-9.
  6. Falk G, Ostlund I, Magnuson A, et al. Teenage mothers - a high-risk group for new unintended pregnancies. Contraception 2006;74:471-5.
  7. Trussell J, Henry N, Hassan F, et al. Burden of unintended pregnancy in the United States: potential savings with increased use of long-acting reversible contraception. Contraception 2013;87:154-61.
  8. Lindh I, Andersson-Ellström AA, et al. A longitudinal study of contraception and pregnancies in the same women followed for a quarter of a century. Hum Reprod 2010;25:1415-22.
  9. Bednarek PH, Creinin MD, Reeves MF, et al; Post-Aspiration IUD Randomization (PAIR) Study Trial Group. Immediate versus delayed IUD insertion after uterine aspiration. N Engl J Med 2011;364:2208-17.
  10. Langston AM, Joslin-Roher SL, Westhoff CL. Immediate post abortion access to IUDs, implants and DMPA reduces repeat pregnancy within 1 year in a New York City practice. Contraception 2014;89:103-8.
  11. Rose SB, Lawton BA. Impact of long-acting reversible contraception on return for repeat abortion. Am J Obstet Gynecol 2012;206:37.e1-6.

Auteurs

Verougstraete A.
Service de Gynécologie, Hôpital Erasme ULB et Sjerp-Dilemma-VUB, centre d’IVG et de contraception à la VUB
COI :

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