Revue d'Evidence-Based Medicine



Quelle est l’utilité des interventions comportementales dans la prévention primaire des maladies cardiovasculaires chez l’adulte ?



Minerva 2023 Volume 22 Numéro 6 Page 147 - 152

Professions de santé

Diététicien, Ergothérapeute, Infirmier, Kinésithérapeute, Médecin généraliste, Pharmacien, Psychologue

Analyse de
Patnode CD, Redmond N, Iacocca MO, Henninger M. Behavioral counseling interventions to promote a healthy diet and physical activity for cardiovascular disease prevention in adults without known cardiovascular disease risk factors: updated evidence report and systematic review for the US Preventive Services Task Force. JAMA 2022;328:375-88. DOI: 10.1001/jama.2022.7408.


Question clinique
Quels sont les avantages et les inconvénients des interventions comportementales favorisant une alimentation saine et l’augmentation des activités physiques pour les facteurs de risque cardiovasculaire chez les adultes n’ayant pas d’antécédents de maladie cardiovasculaire, par rapport à l’absence d’intervention, à une intervention minimale ou à un groupe témoin avec attention (attention control groupe) ?


Conclusion
Cette synthèse méthodique avec méta-analyse montre que les interventions comportementales administrées par des professionnels de santé visant une alimentation saine, l’augmentation de l’activité physique et la réduction des comportements sédentaires chez des patients sans risque cardiovasculaire connu produisent un petit bénéfice statistiquement significatif sur des critères de jugement intermédiaires concernant la santé (tension artérielle, LDL-cholestérol, poids, BMI, tour de taille) et un changement de comportement (apports nutritionnels, activité physique). Cette synthèse méthodique avec méta-analyse est de bonne qualité méthodologique, mais elle est basée sur des RCTs originales dont les informations rapportées sont insuffisantes en ce qui concerne la qualité méthodologique, les participants inclus, les aspects spécifiques des interventions et d’éventuels autres facteurs (par exemple psychosociaux, socioéconomiques) qui peuvent affecter les résultats observés. Il est certainement opportun d’organiser de nouvelles études à grande échelle correctement conçues avec un suivi à long terme.


Contexte

De vastes études d’observation ont déjà montré qu’une consommation quotidienne de fruits et de légumes et une activité physique d’intensité modérée ou élevée protégeaient contre le développement des maladies cardiovasculaires. Par ailleurs, on a constaté que les personnes qui fument, qui sont atteintes d’hypertension artérielle et qui ont le diabète ont un risque 13 fois plus élevé de faire un infarctus du myocarde que celles qui ne présentent pas ces facteurs de risque (1). Ces résultats suggèrent que des changements de mode de vie sur le plan du régime alimentaire, de l’exercice et du comportement sédentaire peuvent grandement contribuer à la prévention primaire des maladies cardiovasculaires. Des commentaires publiés dans Minerva ont traité du rapport entre, d’une part, une alimentation saine (2,3), une activité physique suffisante, l’évitement des comportements sédentaires (4-7) et, d’autre part, une diminution de la morbidité et de la mortalité cardiovasculaires. Des interventions comportementales par des professionnels de santé pourraient offrir un moyen de susciter de tels changements du mode de vie chez les patients. Les interventions comportementales peuvent prévoir d’évaluer la situation, de formuler des commentaires personnalisés, de prodiguer des conseils, d’aider à fixer des objectifs, de prescrire des exercices physiques, d’orienter vers un spécialiste. Pour la prévention des maladies cardiovasculaires, on peut alors mettre l’accent sur la réduction des comportements sédentaires, sur l’augmentation des exercices physiques et sur l’amélioration des habitudes alimentaires.  

 

 

Résumé

 

Méthodologie

Synthèse méthodique et méta-analyse (8).

 

Sources consultées

  • MEDLINE, PsycINFO, le registre central Cochrane des essais contrôlés (Cochrane Central Register of Controlled Trials) ; de janvier 2016 jusque février 2021 
  • listes de références des synthèses méthodiques 
  • suivi de la littérature au moyen d’alertes et d’une recherche orientée dans les journaux pertinents (jusqu’au 9 février 2022).

 

Études sélectionnées 

  • critères d’inclusion : études randomisées contrôlées (randomized controlled trial, RCTs), de qualité moyenne à bonne, qui examinaient l’efficacité d’interventions comportementales pertinentes de première ligne orientées vers une alimentation saine, l’activité physique, la réduction des comportements sédentaires (isolément ou combinées) dans des pays à indice de développement « très élevé » selon l’OMS) chez des adultes ≥ 18 ans ne présentant pas de maladie cardiovasculaire, pas de diabète ni de facteurs de risque cardiovasculaire, mais bien un risque accru d’affections cardiovasculaires lié à l’âge, à la race et aux origines ethniques, aux antécédents familiaux de maladie cardiovasculaire, à la surcharge pondérale ou à l’obésité (BMI ≥ 25,0 kg/m²), aux antécédents de diabète gestationnel ; qui utilisaient au moins un critère de jugement relatif à la santé (comme les affections cardiovasculaires, la mortalité), un critère de jugement intermédiaire (comme la tension artérielle, la lipidémie, la glycémie) ou un critère de jugement relatif au comportement (comme l’alimentation, l’activité physique) ou qui signalaient les effets indésirables découlant de l’intervention ; les interventions comportementales pouvaient être isolées ou faire partie d’une intervention à plusieurs composantes ; elles pouvaient inclure l’évaluation et le feed-back, des conseils, la fixation d’objectifs avec le patient, un soutien, la prescription d’exercices, l’orientation vers des installations ou des programmes pour des exercices ; les interventions étaient effectuées par divers prestataires de soins (médecins, infirmier/ères, diététicien/nes, nutritionnistes, experts en exercice, spécialistes du comportement) par le biais de contacts en face à face, par téléphone, au moyen de documents imprimés et d’outils technologiques ; pour l’activité physique, l’accent était mis sur l’augmentation des activités de type aérobie (comme la natation, le vélo, la marche), l’entraînement en force, la réduction des comportements sédentaires ; pour la nutrition, l’accent était mis sur une augmentation de la consommation de fruits, de légumes, de céréales complètes, de produits à faible teneur en protéines, sur les régimes pauvres en lipides ou sans lipides et sur une diminution de la consommation de sel, d’acides gras saturés et d’acides gras trans, de sucreries et de sodas ; les interventions étaient comparées à l’absence d’intervention (comme une liste d’attente ou la prise en charge habituelle), une intervention minimale (uniquement des informations, des conseils limités), un contrôle de l’attention (même intervention, l’accent étant mis sur un contenu différent)
  • critères d’exclusion : études chez des personnes connues pour avoir une maladie cardiovasculaire, de l’hypertension artérielle (≥ 130/80-89 mmHg), une dyslipidémie, un diabète, une glycémie à jeun anormale ou une intolérance au glucose, chez des personnes présentant un profil de risque cardiovasculaire élevé ; études utilisant comme critère d’inclusion la nécessité de la présence d’au moins un facteur de risque cardiovasculaire ; groupe d’étude fortement limité (par ex. femmes enceintes ou personnes en institution), études menées dans un milieu ne permettant pas la généralisation à la première ligne (comme les études menées chez des patients hospitalisés, dans des écoles ou dans des maisons de repos et de soins), études examinant l’effet de l’intervention sur la perte de poids ou sur le diabète
  • finalement, inclusion de 113 RCTs, dont 18 RCTs avec randomisation par grappe, comptant 32 à 48835 participants par étude, 60 ayant été menées aux États-Unis ; 19% des interventions étaient centrées sur l’alimentation saine, 48% sur l’activité physique, et 33% sur les deux ; la durée de la plupart des études ne dépassait pas 6 mois

 

Population étudiée 

  • 129993 adultes ayant en moyenne 54 ans (ET 12), 80% (ET 20) étant de sexe féminin ; 10% (ET 7) étaient fumeurs ; le BMI était en moyenne de 28 kg/m² (ET 2).

 

Mesure des résultats

  • critères de jugement :
    • critères de jugement relatifs à la santé : maladies cardiovasculaires (AVC, infarctus du myocarde, insuffisance cardiaque), mortalité cardiovasculaire et mortalité toutes causes confondues, qualité de vie
    • critères de jugement intermédiaires relatifs à la santé : tension artérielle, cholestérol total, LDL-cholestérol et HDL-cholestérol, HbA1c, glycémie à jeun, tolérance au glucose, IMC, poids et tour de taille, condition physique cardiorespiratoire (par ex. débit maximal d’oxygène (VO2max)), facteurs de risque cardiovasculaire (hypertension, dyslipidémie, diabète sucré, surcharge pondérale ou obésité, syndrome métabolique), score de risque cardiovasculaire à 10 ans 
    • critères de jugement relatifs au comportement : apports nutritionnels, régime alimentaire, activité physique, comportement sédentaire
    • effets indésirables à la suite de l’intervention : carences nutritionnelles, habitudes alimentaires perturbées, symptômes anxieux, lésions musculosquelettiques, événements cardiovasculaires
  • résultats exprimés en rapport de hasards (hazard ratio, HR), différences moyennes (standardisées) (DM(S)) ou rapport de cotes (odds ratio, OR) ; chaque fois avec un intervalle de confiance (IC) à 95%.

 

Résultats

  • critères de jugement relatifs à la santé 
    • rapportés dans 15 études (n = 58286)
    • après un suivi de 13,4 ans, il n’y avait pas de différence statistiquement significative, en termes de mortalité toutes causes confondues, de coronaropathie, d’accident vasculaire cérébral et de maladie cardiovasculaire, avec une intervention comportementale mettant l’accent sur l’alimentation (régime pauvre en lipides) par comparaison avec le groupe témoin (N = 1 ; n = 47179)
    • après un suivi de 4 ans, on a observé un moindre risque de maladies cardiovasculaires non fatales avec les interventions comportementales mettant l’accent sur l’activité physique et la réduction du comportement sédentaire (intervention avec podomètre), par comparaison avec un groupe témoin (HR de 0,27 avec IC à 95% de 0,08 à 0,88 ; p = 0,03) ainsi que pour les maladies cardiovasculaires fatales (HR de 0,31 avec IC à 95% de 0,11 à 0,93 ; p = 0,04) (N = 2 ; n = 1203)
    • après un suivi de ≥ 6 mois, une amélioration statistiquement significative sur au moins 1 sous-échelle de qualité de vie avec une intervention comportementale, par comparaison avec le groupe témoin, a été montrée pour seulement 3 études (N = 15)
  • critères de jugement intermédiaires relatifs à la santé 
    • rapportés dans 43 études (n = 77965)
    • diminution statistiquement significative dans le groupe intervention, par rapport au groupe témoin, après un suivi de 6 à 18 mois, en ce qui concerne la pression artérielle systolique (différence moyenne pondérée de -0,80 mmHg avec IC à 95% de -1,30 à -0,31 ; N = 23 ; n = 57079 ; I² = 11,3%), la pression artérielle diastolique (différence moyenne pondérée de -0,42 mmHg avec IC à 95% de -0,80 à -0,04 ; N = 24 ; n = 57148 ; I² = 35,8%), le LDL-cholestérol (différence moyenne pondérée de -2,20 mg/dl avec IC à 95% de -3,80 à -0,60 ; N = 15 ; n = 6350 ; I² = 25,7%), le BMI (différence moyenne pondérée de -0,32 kg/m² avec IC à 95% de -0,51 à -0,13 ; N = 27 ; n = 59239 ; I² = 94,6%), le poids (différence moyenne pondérée de -1,07 kg avec IC à 95% de -1,62 à -0,52 ; N = 24 ; n = 51812 ; I² = 91,2%) et le tour de taille (différence moyenne pondérée de -0,81 cm avec IC à 95% de -1,32 à -0,30 ; N = 23 ; n = 52128; I² = 96,6%)
    • pas de différence statistiquement significative quant au cholestérol total, au HDL-cholestérol et à la glycémie à jeun entre le groupe intervention et le groupe témoin
  • critères de jugement relatifs au comportement 
    • rapportés dans 109 études (n = 125878)
    • les interventions comportementales portant sur l’alimentation, par comparaison avec un groupe témoin, étaient associées à une diminution statistiquement significative de la consommation d’acides gras saturés (différence moyenne standardisée (DMS) de -0,53 avec IC à 95% de -0,78 à -0,27 ; N = 16 ; n = 48661 ; I² = 97,4%), à une augmentation de la consommation quotidienne de légumes et de fruits (différence moyenne (DM) de 1,11 portion/jour avec IC à 95% de 0,41 à 1,81 ; N = 17 ; n = 53711 ; I² = 99,3%) et de fibres (DMS de 0,24 avec IC à 95% de 0,05 à 0,43 ; N = 13 ; n = 47571 ; I² = 93,9%) et à une diminution de la consommation quotidienne de sel (-4,9 à -383,0 mg/j ; N = 4 ; n = 1444)
    • avec les interventions comportementales portant sur l’activité physique et sur la réduction du comportement sédentaire, on a observé dans le groupe intervention, par comparaison avec le groupe témoin, une activité physique plus importante, et ce de manière statistiquement significative (DMS de 0,19 avec IC à 95% de 0,14 à 0,25 ; N = 59 ; n = 20801 ; I² = 65,4%), une durée de mobilisation plus importante de 33 minutes en moyenne (DM de 33,0 min/semaine avec IC à 95% de 21,9 à 44,2 ; N = 37 ; n = 1501 ; I² = 76,0%) et une plus grande probabilité d’atteindre le seuil recommandé en termes d’activité physique (OR de 1,41 avec IC à 95% de 1,18 à 1,67 ; N = 24 ; n = 17338 ; I² = 55,1%)
  • effets indésirables
    • rapportés dans 23 études (n = 12452)
    • pas de différence statistique entre le groupe intervention et le groupe témoin.

 

Conclusion des auteurs

Les interventions comportementales portant sur l’alimentation et sur l’activité physique chez des personnes ne présentant pas de facteurs de risque connus de maladie cardiovasculaire étaient associées à des bénéfices, légers mais statistiquement significatifs, pour un certain nombre de critères de jugement intermédiaires importants en termes de santé et à des effets faibles à modérés sur le comportement alimentaire et sur le mouvement. Il y avait un manque de preuves au sujet des résultats pour la santé et des effets indésirables à long terme de ces interventions.

 

Financement de l’étude

Cette étude a été financée par l’Agence pour la recherche et la qualité des soins de santé (Agency for Healthcare Research and Quality, AHRQ) du ministère américain de la Santé et des Services sociaux (US Department of Health and Human Services).

 

Conflits d’intérêt des auteurs

Les auteurs ne mentionnent pas de conflits d’intérêt.

 

 

Discussion

 

Évaluation de la méthodologie

Cette synthèse méthodique est une mise à jour des précédentes synthèses méthodiques sur le même sujet (9). Les auteurs voulaient des réponses à quatre questions de recherche prédéterminées, et ils ont effectué une recherche dans trois bases de données électroniques (MEDLINE, PsycINFO et le registre central Cochrane des essais contrôlés (Cochrane Central Register of Controlled Trials) pour trouver des études s’y rapportant. Cette recherche dans la littérature a été complétée par un suivi de la littérature afin de repérer les études récentes. Les critères d’inclusion et d’exclusion ont été décrits en détail. Deux chercheurs indépendants ont été chargés de la sélection, et, en cas de désaccord, un consensus était recherché. La qualité méthodologique des études a été évaluée selon les critères prédéterminés du Groupe de travail des services de prévention des États-Unis (US Preventive Services Task Force, USPSTF) (promoteur). Ces critères prennent en compte, entre autres, le processus de randomisation, le secret de l’attribution, le biais de sélection, la contamination, l’insu, le biais d’attrition et le biais de notification. Sur cette base, deux chercheurs indépendants ont évalué la qualité méthodologique de chaque étude comme étant bonne, modérée ou faible. Un élément positif réside dans le fait que les études faibles ont été exclues. Mais on peut regretter que ni l’article ni les suppléments ne donnent d’informations transparentes à ce propos. Un chercheur a extrait toutes les données des études incluses, qui ont été vérifiées par un deuxième chercheur. Pour chaque question de recherche, la force des preuves a été évaluée selon la méthode décrite dans le Guide des examens de l’efficacité et de l’efficacité comparative (Methods Guide for Effectiveness and Comparative Effectiveness Reviews) (10). Cela permet de tenir compte du nombre, de la taille et de la qualité des études, ainsi que de la cohérence et de la précision des résultats des différentes études. Cette évaluation a donné lieu à un degré de certitude faible, modéré à élevé, mais cette estimation est également peu transparente. Les résultats sont présentés de manière claire. Les critères de jugement intermédiaires concernant la santé et concernant le comportement ont pu être regroupés à l’aide du modèle à effets aléatoires. Les résultats ont été exprimés en différences moyennes (standardisées). La mise en commun n’a pas été possible pour les critères de jugement concernant la santé et pour les effets indésirables parce que les études disponibles étaient en nombre insuffisant. Les résultats de certaines études sont présentés de manière narrative. Pour l’intervention portant sur l’alimentation, le rapport de hasards a été repris de l’étude elle-même. Pour les interventions portant sur l’exercice, il semble que les résultats ont été regroupés. On ne sait pas comment les rapports de hasards qui sont rapportés ont été calculés. 

 

Évaluation des résultats

Une valeur ajoutée, statistiquement significative mais faible, des interventions comportementales portant sur une alimentation saine et sur l’activité physique pour les critères de jugement intermédiaires relatifs à la santé et au comportement a été rapportée chez des personnes ne présentant pas d’augmentation du risque de maladie cardiovasculaire. Le résultat est conforme à un guide de pratique clinique de l’American College of Cardiology et de l’American Heart Association soulignant les effets positifs d’une alimentation saine, d’une activité physique régulière et de l’évitement des activités sédentaires (111). Cependant, les tailles d’effet étaient plus petites que dans une synthèse méthodique du même groupe d’études chez des personnes présentant un risque cardiovasculaire accru (12). Nous devons toutefois faire remarquer que la plupart des études incluses ne rapportent pas le risque cardiovasculaire initial des participants (tel que le pourcentage de participants présentant de l’hypertension artérielle ou une dyslipidémie). Nous ne pouvons que « supposer » que les participants ne présentaient pas de risque cardiovasculaire accru, car la plupart des études n’ont pas explicitement sélectionné la population de l’étude en fonction d’un risque sous-jacent. Étant donné que le recrutement se faisait généralement sur invitation, il est également possible que les participants qui ont été sélectionnés étaient surtout des personnes motivées à changer de comportement et ouvertes à participer à des interventions comportementales. Cela peut avoir entraîné un biais important, car la motivation est un facteur fondamental pour créer un changement de comportement. L’effet pourrait donc être moins marqué dans la réalité. D’autres études ont montré que des facteurs comme la connaissance des maladies cardiovasculaires, les facteurs socioéconomiques (13) et la motivation jouent un rôle clef dans les attitudes à l’égard d’un mode de vie sain et dans le maintien de ce dernier (14). Ces facteurs n’étaient pas suffisamment pris en compte dans les études incluses. La plupart des interventions impliquaient des conseils personnalisés, des encouragements à se fixer des objectifs et une autosurveillance. Dans les études les plus récentes principalement, des moyens technologiques ont été utilisés pour soutenir les interventions. Les études restent cependant cliniquement très hétérogènes les unes par rapport aux autres. Par conséquent, aucune recommandation ne peut être formulée quant aux composants minimaux requis pour un traitement efficace. De ce fait, il est difficile d’appliquer les résultats dans la pratique clinique. En outre, les informations sur les effets à long terme sont insuffisantes, et, sur la base des données actuelles, nous ne pouvons pas identifier les sous-groupes susceptibles de bénéficier davantage des interventions comportementales.

 

Que disent les guides de pratique clinique ?

Le guide de pratique clinique de Domus Medica sur la prise en charge globale du risque cardiovasculaire propose comme objectif thérapeutique pour la réduction du risque cardiovasculaire d’inciter les patients à changer de mode de vie grâce à des entretiens motivationnels. De plus, il est conseillé d’établir un plan de traitement individuel qui comprend des éléments tels qu’une alimentation saine, de l’exercice, mais aussi un sevrage tabagique et un traitement médicamenteux, en fonction du contexte clinique et des souhaits du patient (15). Le changement de comportement, la prise en compte des facteurs psychosociaux individuels, l’augmentation de l’activité physique et la réduction des comportements sédentaires, une alimentation saine, l’arrêt du tabac et le maintien d’un poids santé sont également des recommandations importantes en matière de mode de vie dans le guide de pratique clinique sur la gestion des risques cardiovasculaires (Cardiovasculair risicomanagement, CVRM) de la Fédération des médecins spécialistes aux Pays-Bas (Federatie Medische Specialisten) (16).

 

 

Conclusion de Minerva

Cette synthèse méthodique avec méta-analyse montre que les interventions comportementales administrées par des professionnels de santé visant une alimentation saine, l’augmentation de l’activité physique et la réduction des comportements sédentaires chez des patients sans risque cardiovasculaire connu produisent un petit bénéfice statistiquement significatif sur des critères de jugement intermédiaires concernant la santé (tension artérielle, LDL-cholestérol, poids, BMI, tour de taille) et un changement de comportement (apports nutritionnels, activité physique). Cette synthèse méthodique avec méta-analyse est de bonne qualité méthodologique, mais elle est basée sur des RCTs originales dont les informations rapportées sont insuffisantes en ce qui concerne la qualité méthodologique, les participants inclus, les aspects spécifiques des interventions et d’éventuels autres facteurs (par exemple psychosociaux, socioéconomiques) qui peuvent affecter les résultats observés. Il est certainement opportun d’organiser de nouvelles études à grande échelle correctement conçues avec un suivi à long terme.

 

 


Références 

  1. Yusuf S, Hawken S, Ounpuu S, et al. Effect of potentially modifiable risk factors associated with myocardial infarction in 52 countries (the INTERHEART study): case-control study. Lancet 2004;364:937-52. DOI: 10.1016/S0140-6736(04)17018-9 
  2. Roberfroid D. Prévention primaire des maladies cardiovasculaires par une alimentation de type méditerranéen. MinervaF 2014;13(1):8-9
  3. Estruch R, Ros E, Salas-Salvadó J, et al. Primary prevention of cardiovascular disease with a Mediterranean diet. N Engl J Med 2013;368:1279-90. (Retraction and republication.) DOI: 10.1056/NEJMoa1200303
  4. De Cocker K. Mode de vie actif et mortalité : le nombre de pas quotidiens et la cadence ont-ils un effet ? Minerva Analyse 1/12/2020
  5. Saint-Maurice PF, Troiano RP, Bassett DR, et al. Association of daily step count and step intensity with mortality among US adults. JAMA 2020;323:1151-60. DOI: 10.1001/jama.2020.1382
  6. De Cocker K, De Smet A, Verloigne M. Relation entre le temps consacré à des activités sédentaires et la morbidité, la mortalité et l’hospitalisation. MinervaF 2015;14(6):72-3.
  7. Biswas A, Oh PI, Faulkner GE, et al. Sedentary time and its association with risk for disease incidence, mortality and hospitalization in adults: a systematic review and meta-analysis. Ann Int Med 2015;162:123-32. DOI: 10.7326/M14-1651
  8. Patnode CD, Redmond N, Iacocca MO, Henninger M. Behavioral counseling interventions to promote a healthy diet and physical activity for cardiovascular disease prevention in adults without known cardiovascular disease risk factors: updated evidence report and systematic review for the US Preventive Services Task Force. JAMA 2022;328:375-88. DOI: 10.1001/jama.2022.7408 
  9. Patnode CD, Evans CV, Senger CA, et al. Behavioral counseling to promote a healthful diet and physical activity for cardiovascular disease prevention in adults without known cardiovascular disease risk factors: updated systematic review for the U.S. Preventive Services Task Force. Agency for Healthcare Research and Quality; 2017. Evidence Synthesis, No. 152. AHRQ publication 15-05222-EF-1
  10. Berkman N, Lohr K, Ansari M, et al. Grading the strength of a body of evidence when assessing health care interventions for the Effective Health Care Program of the Agency for Healthcare Research and Quality: an update. In: Agency for Healthcare Research and Quality, eds. Methods Guide for Effectiveness and Comparative Effectiveness Reviews. Agency for Healthcare Research and Quality; 2014:314-349. AHRQ publication 10(14)-EHC063-EF
  11. Arnett DK, Blumenthal RS, Albert MA, et al. 2019 ACC/AHA Guideline on the primary prevention of cardiovascular disease: a report of the American College of Cardiology/American Heart Association Task Force on Clinical Practice Guidelines [published correction appears in Circulation 2019;140:e649-e650; in Circulation 2020;141:e60, in Circulation 2020;141:e774 and Circulation 2019;140:e596-e646. DOI: 10.1161/CIR.0000000000000678 
  12. O’Connor EA, Evans CV, Rushkin MC, et al. Behavioral counseling interventions to promote a healthy diet and physical activity for cardiovascular disease prevention in adults with cardiovascular risk factors: updated systematic review for the U.S. Preventive Services Task Force. Agency for Healthcare Research and Quality; 2020. Evidence Synthesis, No. 195. Report No.: 20-05263-EF-1
  13. Hassen HY, Bowyer M, Gibson L, et al. Level of cardiovascular disease knowledge, risk perception and intention towards healthy lifestyle and socioeconomic disparities among adults in vulnerable communities of Belgium and England. BMC Public Health 2022;22:197. DOI: 10.1186/s12889-022-12608-z 
  14. Wiesemann A, Ludt S, Szecsenyi J, et al. Cardiovascular risk factors and motivation for a healthy life-style in a German community--results of the GP-based Oestringen study. Patient Educ Couns 2004;55:40-7. DOI: 10.1016/j.pec.2003.07.002
  15. Globaal cardiovasculair risicobeheer. Ebpracticenet. Domus Medica 2007. (Ressource uniquement disponible en Néerlandais.)
  16. Cardiovasculair risicomanagement (CVRM). Richtlijnendatabank. Federatie Medische Specialisten 2019. Url: https://richtlijnendatabase.nl/richtlijn/cardiovasculair_risicomanagement_cvrm/risicofactor_interventie_bij_cvrm/leefstijladviezen_bij_cvrm.html 

 




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