Revue d'Evidence-Based Medicine



Critères composites : interprétation clinique



Minerva 2009 Volume 8 Numéro 5 Page 68 - 68

Professions de santé


 

 

Formation médicale continue ~ Concepts et outils en EBM

La rédaction consacre une rubrique ‘Formation médicale continue’ (FMC) à l’explicitation de concepts et outils en Evidence-Based Medicine (EBM).

 

De nombreuses études dans le domaine cardiovasculaire utilisent des critères de jugement composites, c’est-à-dire des critères composés d’un ensemble d’éléments, par exemple l’association d’infarctus du myocarde, d’angor, de processus de revascularisation et de décès. Sur 304 RCTs à 2 bras d’étude et ayant recours à ce type de critère, 73% le font pour le critère primaire et 27% pour le critère secondaire. Au plus l’échantillon d’étude est faible, au plus fourni est le critère composite. Le critère décès est la composante la plus fréquemment utilisée mais elle contribue de façon minime au nombre total d’événements repris pour le critère composite, au contraire des processus de revascularisation. Le nombre d’événements correspondant au critère composite ne représente qu’une partie de l’ensemble des événements cardiovasculaires survenus pendant les études dans 73% des cas (1).

 

Cet exemple illustre bien l’intérêt, les limites et la nécessité d’une interprétation correcte des critères composites.

 

Motivation du critère composite

Les preuves de l’efficacité d’un traitement en termes de prévention des décès en cours d’étude est relativement difficile à apporter au vu du nombre important de patients à inclure, surtout si le risque n’est pas fort élevé. L’inclusion de ce critère « décès » au sein d’un critère composite primaire permet de réduire la taille d’échantillon et/ou la durée de suivi. Ce critère « décès » a-t-il la même ou plus d’importance qu’un critère « processus de revascularisation » mis sur le même pied dans le critère composite mais beaucoup plus fréquent et pouvant ainsi apporter une signification statistique pour le critère composite (que nous considérons, dans cet exemple, primaire) ? Pour rappel, le critère primaire est le critère qui permet de juger de l’efficacité du traitement ; la puissance de l’étude est calculée pour ce critère primaire.

 

La construction du critère composite

Selon plusieurs auteurs, trois règles sont à respecter pour le bon choix des composantes d’un critère composite. Ce choix doit reposer sur la supposition que chacune des composantes est également importante pour le patient (2- 4). Ensuite, l’incidence d’événements doit être similaire pour la composante la plus importante et pour la composante la moins importante (2,4). Enfin, l’efficacité attendue du traitement doit être similaire sur ces différents critères composant le critère composite (2,4).

Il faut y ajouter l’importance de la construction du critère composite dans le protocole initial et non en cours d’étude. Interdit donc d’en modifier les composantes en cours d’étude (voir ProACTIVE (5)) et bien sûr de remplacer un critère primaire de décès par un critère primaire composite (décès ou hospitalisation pour motif cardiovasculaire (CAPRICORN avec le carvédilol post infarctus du myocarde (6))).

 

Interprétation clinique

Une synthèse méthodique (7) des RCTs dans le domaine cardiovasculaire, publiées dans les revues les plus réputées, montre de larges gradients dans l’importance accordée par les patients entre les différentes composantes du critère composite utilisé dans l’étude. II en est de même pour l’ampleur de l’effet observé. Des composantes de grande importance pour les patients sont associées à une efficacité moindre que celle de composantes moins importantes : RRR de décès de 8% versus 33% pour des composantes de peu d’importance pour le patient. 

Une non concordance est donc observée, dans cette synthèse comme dans la recherche qui nous sert d’exemple initial (1), entre l’efficacité évaluée au niveau du critère composite et celle observée pour une ou plusieurs de ses composantes. Les critiques insistent donc sur la nécessité d’un choix hiérarchisé, lors de l’inclusion de plusieurs événements par individu dans le critère composite, choix généralement non mentionné, comme ne sont rapportés ni le nombre d’événements individuels ni le nombre de participants dans chaque cas (1). Ces derniers auteurs concluent que l’évaluation générale d’une efficacité par un critère composite ne peut être extrapolée à une efficacité similaire pour chacune des composantes de ce critère composite (1), rejoignant des avis plus anciens (3) qui insistaient sur l’intérêt d’analyser donc les résultats séparés pour chacun des composantes du critère composite.

 

 

 

Références

  1. Lim E, Brown A, Helmy A, et al. Composite outcomes in cardiovascular research: a survey of randomized trials. Ann intern Med 2008;149:612-7.
  2. Montori VM, Permanyer-Miralda G,  Ferreira-Gonzalez I, et al. Validity of composite end points in clinical trials. BMJ 2005;330:594-6.
  3. Freemantle N, Calvert M, Wood J, et al. Composite outcomes in randomized trials: greater precision but with greater uncertainty? JAMA 2003;289:2554-9.
  4. Montori VM, Busses JW, Permanyer-Miralda G, et al. How should clinicians interpret results reflecting the effect of an intervention on composite end points: should I dump this lump? Evid Based Med 2005;10:162-3
  5. van Driel M, Christiaens T. Pioglitazone pour le diabète : espoirs déçus. MinervaF2006;5(6):86-8.
  6. Dargie HJ. Effect of carvedilol on outcome after myocardial infarction in patients with left-ventricular dysfunction: the CAPRICORN randomised trial. Lancet 2001;357:1385-90.
  7. Ferreira-González I, Busse JW, Heels-Ansdell D, et al. Problems with use of composite end points in cardiovascular trials: systematic review of randomised controlled trials. BMJ 2007;334:786-92.
Critères composites : interprétation clinique



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