Analyse


Pas de rivaroxaban pour les patients immobilisés pour une pathologie médicale


28 05 2013

Professions de santé

Analyse de
Cohen AT, Spiro TE, Büller HR, et al; MAGELLAN investigators. Rivaroxaban for thromboprophylaxis in acutely ill medical patients. N Engl J Med 2013;368:513-23.


Conclusion
Cette étude montre que, chez des adultes >40 ans immobilisés pour une pathologie médicale, un traitement par rivaroxaban durant 10 jours n’est pas inférieur à de l’énoxaparine, mais qu’il provoque par contre davantage de saignements majeurs ou cliniquement pertinents. Le traitement de 25 jours supplémentaires avec du rivaroxaban étant comparé à un placebo après les 10 jours d’énoxaparine, aucune conclusion pratique n’est possible à ce terme.


 


Texte sous la responsabilité de la rédaction francophone

 

Nous avons analysé dans la revue Minerva (1) une RCT évaluant l’intérêt de l’apixaban en prévention de la thromboembolie veineuse chez des patients alités pour raison médicale et à risque (2). Versus énoxaparine 40 mg/j en SC administrée pendant environ 7 jours, 2,5 mg d’apixaban 2 x/j pendant 25 jours environ n’étaient pas plus efficaces mais provoquaient davantage de saignements majeurs. Nous avions évoqué l’étude MAGELLAN dans notre analyse, sur données présentées lors d’un congrès.

Cette étude MAGELLAN, une RCT évaluant le rivaroxaban, vient récemment d’être publiée (3). Elle inclut 8 101 patients âgés d’au moins 40 ans, hospitalisés depuis moins de 72 heures pour une pathologie médicale aiguë et à mobilité réduite. Les patients sont traités soit par énoxaparine 40 mg/j en SC pendant 10 (± 4) jours + médicament placebo pendant 35 (± 4) jours, soit par placebo SC pendant 10 (± 4) jours et rivaroxaban 10mg/j PO pendant 35 (± 4) jours. Le protocole prévoyait 2 critères de jugement primaires. Le premier est composite (thrombose veineuse profonde (TVP) asymptomatique, TVP proximale ou distale, embolie pulmonaire (EP) symptomatique ou décès thromboembolique veineux) du jour 1 au jour 10, avec analyse en non-infériorité prévue. Pour ce critère, une non-infériorité est montrée : 2,7% dans les 2 groupes, RR de à 0,97 avec IC à 95% de 0,71 à 1,31 ; p=0,003. Le second critère primaire est le résultat au jour 35 pour les mêmes évènements sommés, en analyse de supériorité : RR de 0,77 avec IC à 95% de 0,62 à 0,96 et p = 0,02. Soulignons bien qu’à partir du jour 11, aucun traitement actif n’était plus administré dans le groupe énoxaparine alors que le rivaroxaban était poursuivi jusqu’au jour 35. C’est donc bien versus placebo que le rivaroxaban se montre plus efficace.

Par contre, pour le critère primaire composite de sécurité (hémorragies majeures ou saignements non majeurs mais cliniquement pertinents), le nombre d’évènements est significativement plus élevé sous rivaroxaban à 10 jours (2,8% versus 1,2%, p<0,001 pour la différence)  comme à 35 jours (4,1% versus 1,7%).

Comme pour l’apixaban dans cette indication, un bénéfice net est loin d’être évident. Pour la période comparant 2 traitements actifs (les 10 premiers jours), le rivaroxaban n’évite pas plus d’évènements TEV mais il provoque significativement plus d’hémorragies. Pour l’extension à 35 jours, une comparaison rivaroxaban versus énoxaparine (et non placebo) aurait été plus instructive.

 

Conclusion

Cette étude montre que, chez des adultes >40 ans immobilisés pour une pathologie médicale, un traitement par rivaroxaban durant 10 jours n’est pas inférieur à de l’énoxaparine, mais qu’il provoque par contre davantage de saignements majeurs ou cliniquement pertinents. Le traitement de 25 jours supplémentaires avec du rivaroxaban étant comparé à un placebo après les 10 jours d’énoxaparine, aucune conclusion pratique n’est possible à ce terme.

 

 

Références

  1. Chevalier P. Pas d’apixaban pour les patients immobilisés par une pathologie médicale. MinervaF 2012;11(2):23-4.
  2. Goldhaber SZ, Leizorovicz A, Kakkar AK, et al; ADOPT Trial Investigators. Apixaban versus enoxaparin for thromboprophylaxis in medically ill patients. N Engl J Med 2011;365:2167-77.
  3. Cohen AT, Spiro TE, Büller HR, et al; MAGELLAN investigators. Rivaroxaban for thromboprophylaxis in acutely ill medical patients. N Engl J Med 2013;368:513-23.
Pas de rivaroxaban pour les patients immobilisés pour une pathologie médicale



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