Revue d'Evidence-Based Medicine



Analyse en sous-groupes (mise à jour)



Minerva 2010 Volume 9 Numéro 10 Page 124 - 124

Professions de santé


 

Formation médicale continue ~ Concepts et outils en EBM

La rédaction consacre une rubrique ‘Formation médicale continue’ (FMC) à l’explicitation de concepts et outils en Evidence-Based Medicine (EBM).

 

Nous avons déjà évoqué dans Minerva (1) les pièges des analyses en sous-groupes régulièrement effectuées en complément d’une analyse globale des résultats d’une étude. Ces analyses visent à rechercher l’effet du traitement évalué dans une sous-population d’une recherche, à établir une interaction entre une ou plusieurs variables et l’effet du traitement. Différents auteurs ont tenté de définir les conditions nécessaires pour assurer une fiabilité suffisante à ce type d’analyse (2). Plus récemment, cette proposition a été complétée (3). C’est cette dernière version que nous résumons ci-dessous. Les 5 premières propositions concernent le protocole, les 2 suivantes l’analyse et les 4 dernières le contexte.

 

Protocole

  • La variable « sous-groupe » doit être fixée lors de la randomisation et non après celle-ci. Déterminer un sous-groupe sur les caractéristiques après randomisation expose au risque que l’intervention elle-même explique la différence d’efficacité apparente entre les groupes (par sélection des groupes liée à l’intervention). Par exemple, un traitement évalué modifie la durée du séjour en soins intensifs. Une analyse en sous-groupes suivant la durée de séjour en soins intensifs, sous-groupes déterminés en fin d’étude, est trompeuse. Une analyse en sous-groupes suivant le sexe ou l’âge ne le serait pas.
  • L’effet est suggéré plus par les comparaisons dans l’étude que par des comparaisons entre études. Une comparaison indirecte (entre deux études) est moins fiable qu’une comparaison directe, ce qui est communément admis pour toutes les études.
  • L’hypothèse a été formulée initialement et non après l’analyse des résultats. L’étude doit servir à vérifier une hypothèse et une hypothèse générée par une étude doit faire l’objet d’une autre étude.
  • La direction de l’effet de sous-groupe a été spécifiée a priori. Ne pas pronostiquer la direction de la différence d’effet ou la pronostiquer en sens opposé rend l’observation plus aléatoire.
  • L’effet de sous-groupe est un des rares effets hypothétiques testés. L’inflation du nombre d’hypothèses testées augmente le risque que les interactions découvertes soient liées au hasard.

 

Analyse

  • Des tests d’interaction suggèrent une faible probabilité que la différence pour le sous-groupe soit liée au hasard. Des tests d’interaction doivent être réalisés, tests similaires au test d’hétérogénéité en méta-analyse, avec comme hypothèse zéro l’absence de différence ; au plus la valeur p est basse au moins probable est le risque que la différence soit liée au hasard. Une valeur p≤0,001 est proposée pour considérer une hypothèse comme sérieuse (3).
  • L’effet de sous-groupe estimé significatif est indépendant d’autres variables. Les interactions peuvent être liées les unes aux autres et donc constituer un facteur commun. Il faut donc introduire les différentes interactions possibles dans une analyse en régression. Par exemple, dans une étude sur l’importance d’un fraisage avant un enclouage tibial pour fracture, analyser conjointement la présence ou non de tabagisme et le caractère ouvert ou fermé de la fracture si les 2 items peuvent être liés.

 

Contexte

  • L’ampleur de la différence pour le sous-groupe est large. Une ampleur plus importante est cliniquement plus pertinente ; la puissance d’étude doit ici être prise en considération, une ampleur d’effet importante pour un échantillon faible pouvant être liée au hasard.
  • L’interaction est cohérente avec les autres études. L’existence d’une synthèse méthodique rigoureuse est la meilleure garantie disponible dans ce domaine.
  • L’interaction est cohérente avec d’autres critères proches dans la même étude. Si un effet de sous-groupe est réel, il se manifeste probablement pour d’autres critères de jugement proches (par exemple taux de survie et délai de récidive dans une évaluation d’un traitement oncologique).
  • Il existe des preuves indirectes argumentant l’interaction hypothétique. Les preuves indirectes peuvent être fournies par des études sur différentes populations (y compris animales), par des observations d’interactions pour des interventions similaires, par des résultats d’études sur d’autres critères liés (intermédiaires). Malgré le respect de ces différentes conditions, il est admis que si la population d’étude est limitée et la puissance d’étude faible, des études en sous-groupes peuvent montrer des résultats faussement positifs (4). Certains auteurs (5) sont encore plus sévères : « les analyses en sous-groupes ne génèrent que des nouvelles hypothèses qui devront être confirmées par de nouveaux essais. »

 

 

 

Références

  1. Chevalier P, van Driel M. Les pièges des analyses en sous-groupes. MinervaF 2007;6(1):1.
  2. Oxman AD, Guyatt GH. A consumer’s guide to subgroup analyses. Ann Intern Med 1992;116:78-84.
  3. Sun X, Briel M, Walter SD, et al. Is a subgroup effect believable? Updating criteria to evaluate the credibility of subgroup analyses. BMJ 2010;340:c117.
  4. Oxman A, Guyatt G. When to believe a subgroup analysis. In: Users' Guides to the Medical Literature. Copyright 2002, American Medical Association.
  5. Cucherat M. Analyse en sous-groupe.
Analyse en sous-groupes (mise à jour)

Auteurs

Chevalier P.
médecin généraliste
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