Revue d'Evidence-Based Medicine
Traitement du carcinome basocellulaire
Minerva 2005 Volume 4 Numéro 10 Page 148 - 150
Professions de santé
Résumé
Contexte
Le carcinome basocellulaire est le cancer le
plus fréquent et se rencontre de plus en plus souvent chez des personnes plus
jeunes. Il métastase rarement, mais peut cependant occasionner localement des
destructions tissulaires importantes. Bien que la prise en charge du
carcinome basocellulaire reste en premier lieu la
chirurgie (avec un contrôle éventuel des marges de section), d'autres possibilités
de traitement sont proposées, telles que le curetage, la cryochirurgie, le
laser, la radiothérapie, le traitement topique avec le 5-fluorouracil ou l'imiquimod, la thérapie photo-dynamique
et l'interféron intra-lésionnel.
Méthode
Synthèse méthodique.
Sources consultées
Les auteurs ont cherché dans Medline (1966-2003), Embase (1980-2003), le Cochrane Skin Group Specialised
Register (2003), la Cochrane
Library (2004), dans les listes de références des
études et des synthèses méthodiques et ont contacté des experts.
Etudes sélectionnées
Les études randomisées, contrôlées, qui ont évalué des interventions pour
des carcinomes basocellulaires dont le diagnostic
est, au préalable, confirmé histologiquement. Dix-huit études ont été incluses,
dont quatre sont de bonne qualité et quatorze de qualité moyenne.
Population étudiée
Le nombre de patients inclus dans les études varie de 35 à 174, avec un âge moyen d'environ 60 ans 1. Le diamètre des lésions n'excédait pas les 2 cm dans la plupart des études.
Mesure des résultats
Le critère de jugement primaire est le contrôle clinique de la tumeur
après un suivi de trois à cinq ans. Les critères de jugement secondaires sont
une récidive précoce confirmée histologiquement (endéans les six mois) et les
effets indésirables du traitement.
Résultats
Les 18 études incluses sont fort hétérogènes, ce
qui rend la sommation des données impossible pour certains traitements.
L'excision chirurgicale avec contrôle peropératoire des marges de section versus radiothérapie d'un carcinome basocellulaire
du visage (diamètre <40mm) donne, dans une étude (n=347), après un
suivi de quatre ans, un moindre taux de rechute tumorale (OR 0,09; IC à 95%
de 0,01 à 0,67) et un meilleur résultat esthétique.
Une étude (n=93) montre, après un an, un nombre significativement
supérieur de récidives (39% vs 4%) après cryothérapie versus radiothérapie.
Une étude (n=96) dans des cas de carcinome superficiel et nodulaire, du
visage, ne montre pas de différence significative de récidive entre la cryochirurgie
ou l'excision chirurgicale, après un an de suivi.
Une étude (n=88) n'a pas observé, en cas de carcinome basocellulaire
superficiel et nodulaire, de différence significative pour les récidives
après thérapie photodynamique
versus cryochirurgie (5% vs 13%). Le résultat esthétique est
significativement meilleur dans le groupe thérapie photodynamique.
Aucune étude comparative n’est disponible concernant l'interféron intralésionnel, le fluorouracil
et l'imiquimod 5%.
Conclusion des auteurs
Les auteurs concluent qu'une recherche qualitative du
traitement du carcinome basocellulaire fait défaut.
La plupart des études incluent des patients dont le carcinome basocellulaire est situé à des endroits à faible risque.
Ils proposent la chirurgie et la radiothérapie comme traitements probablement
les plus efficaces. La chirurgie connaît le moins d'échecs thérapeutiques.
D'autres traitements pourraient avoir une place mais doivent encore être
comparés à la chirurgie.
Financement
Non mentionné.
Conflits d'intérêt
Tous les auteurs sont impliqués dans une étude randomisée, contrôlée,
dans laquelle l'imiquimod est comparé à l'excision
pour le traitement du carcinome basocellulaire
superficiel et nodulaire. Cette étude est financée par Cancer Research UK.
Discussion
Banque de bonnes études
L'excision
comme traitement de base
La chirurgie reste le traitement de référence du carcinome basocellulaire 2. Une excision avec une marge saine de 2 à 4 mm donne
dans 95% des cas un contrôle suffisant. Lors d'une excision jugée incomplète
en fonction du diagnostic histologique, la réexcision
immédiate est le traitement de choix 2. La
chirurgie micrographique de Mohs est une forme
spécialisée de chirurgie exigeante en main d'œuvre, qui effectue un
contrôle peropératoire des marges de section. Le
but est d'obtenir un contrôle tumoral adéquat avec une épargne maximale du
tissu sain. Dans une étude randomisée, contrôlée, récemment publiée,
l'excision avec une marge saine de 3 mm est comparée à la chirurgie de Mohs pour le traitement de carcinomes basocellulaires
primaires ou récidivants, d'un diamètre maximal de 1 cm et localisés au
visage 4. La différence observée n’est pas significative pour le nombre de
récidives postopératoires (30 mois de suivi). Celles-ci sont au nombre de 1%
(maximum 3,7%) pour un carcinome basocellulaire
primaire et de 3% (maximum 5%) pour une lésion récidivante. Le résultat
esthétique est comparable. Par contre, davantage de complications sont observées
après une excision avec une marge de 3 mm en comparaison avec la chirurgie de
Mohs pour une récidive de carcinome basocellulaire. Le curetage, l'électrodessication,
la cryochirurgie et le laser CO2 sont d'autres techniques
destructrices connaissant plus d'échecs thérapeutiques possibles 2. L'inconvénient de ces techniques est l'absence de
contrôle histologique des marges tumorales et une guérison de la plaie qui
peut être prolongée en comparaison avec l'excision avec suture 2.
Le traitement avec le 5-fluorouracil provoque souvent des réactions
locales intenses avec formation de cicatrices, ce qui en limite l'usage
surtout au niveau du visage 2. Une étude qui
compare la radiothérapie à la chirurgie avec contrôle des marges de section
sur coupe congelée, montre un risque de récidive significativement plus élevé
dans le groupe radiothérapie 3. Le résultat
esthétique est de surcroît nettement moins bon dans ce dernier groupe de
patients. La radiothérapie peut être envisagée pour un carcinome basocellulaire lorsque la chirurgie curatrice n'est pas
possible pour l'une ou l'autre raison 1. La
thérapie photodynamique, l'imiquimod
et l'interféron sont des traitements plus récents et plus onéreux. Le
traitement à base d'interféron trouvera moins une place dans la pratique
courante en raison de ses effets indésirables systémiques 5.
Pour le carcinome basocellulaire nodulaire, une
étude récente montre, après un an de suivi, une tendance à une récidive
tumorale plus grande après thérapie photodynamique
versus chirurgie (17% versus 4%) 6.
Le taux de récidives en cas de carcinome basocellulaire
superficiel est habituellement plus bas7. Le résultat esthétique
de la thérapie photodynamique est cependant
supérieur à celui de la chirurgie 6,7. Une étude de phase III contrôlée versus excipient montre,
pour le carcinome basocellulaire superficiel, une
disparition histologique tumorale dans 80% des cas grâce à l'application
quotidienne d'imiquimod durant six semaines 8.
Une étude contrôlée comparant l'imiquimod avec la
chirurgie est en cours.
Conclusions
Références
- Bath FJ, Bong J, Perkins W, Williams HC. Interventions for basal
cell carcinoma of the skin. Cochrane Database Syst Rev 2003, Issue 2.
- Thissen M, Neumann H, Schouten L. A systematic review
of treatment modalities for primary basal cell carcinomas. Arch Dermatol 1999;135:1177-83.
- Wong CS, Strange RC, Lear JT. Basal cell carcinoma. BMJ
2003;327:794-8.
- Smeets NW, Krekels GA, Ostertag JU, et al. Surgical excision vs Mohs'
micrographic surgery for basal-cell carcinoma of the face: randomised controlled trial. Lancet 2004;364:1766-72.
- Avril M, Auperin
A, Margulis A et al. Basal cell carcinoma of the
face: surgery or radiotherapy? Results of a randomized study. Br J Cancer 1997;76:100-6.
- Rhodes L, de Rie M, Engstrom Y et al. Photodynamic therapy using
topical methyl aminolevulinate vs
surgery for nodular basal cell carcinoma: results of a multicenter
randomized prospective trial. Arch Dermatol
2004;140:17-23.
- Horn M, Wolf P, Wulf HC et al. Topical methyl aminolaevulinate
photodynamic therapy in patients with basal cell carcinoma prone to
complications and poor cosmetic outcome with
conventional treatment. Br J Dermatol 2003;149:1242-9.
- Schulze HJ, Cribier B, Requena L et al. Imiquimod 5% cream for the treatment of superficial basal cell carcinoma: results from a randomized vehicle-controlled phase III study in Europe. Br J Dermatol 2005;152:939-47.
Noms de marque
5-Fluorouracil:
Efudix
®
Imiquimod: Aldara®
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